Animal objet, le crocodile reprend forme et tel est son nom, évocateur. Cette pièce de design, réalisée en 2010, est faite d’une peau d’alligator gainée sur une coque en résine polyester par François Azambourg, diplômé de l’ENSAAMA Olivier de Serres, designer industriel et enseignant à l’ENSCI Les Ateliers. Plébiscité par les plus grandes maisons, telles que Hermès ou Ligne Roset/Cinna, il a souhaité auto-éditer un certain nombre de ses pièces, jugées trop complexes ou inadaptées à l’industrie actuelle, dans un modèle expérimental nouveau, en connivence avec sa représentation de la technique qu’il décrit au travers de son atelier comme un lien entre l’univers et le vivant. C’est un inventeur qui injecte dans sa pratique du design une certaine intuition des concepts de légèreté, de structure et de contre-pied ; on lui doit notamment une cafetière en papier, un saxophone ergonomique ou un composite cuir-mousse. C’est au travers de son obsession de l’économie de moyens et de la fusion de matériaux synthétiques et naturels qu’il crée ; il a d’ailleurs breveté de nombreux procédés nouveaux, qui au travers de sa vision poétique, prennent une dimension pratique dans les domaines de l’ameublement mais également de la bagagerie de haut-luxe.
Animal objet, sans fonction particulière, à mi-chemin entre décoration et œuvre d’art, est en fait l’une des pièces que le designer a réalisées lors de sa participation à l’exposition « Intérieurs Cuirs Acte 2 ». Si l’artiste a conçu une série de quarante-cinq objets d’habitat, tous exploitant les qualités plastiques du cuir avec l’ingénie qui lui est propre, celle-ci est la pièce qu’il définit comme étant la plus manifeste. Elle s’inscrit dans la démarche qu’il a de vouloir associer le naturel à l’industriel, au travers de pratiques expérimentales, tout en questionnant le statut ambigu que l’on accorde à l’animal dans les pratiques et la médiation du design… Nous nous attacherons à questionner les enjeux soulevés par cette pratique du design dans la relation qu’entretiennent homme, animal et objet.
cuir et peaux précieuses, des matériaux à part
Ce sont les multiples plasticités du cuir qui rendent ce matériau intéressant. Organique et propre aux différentes espèces animales, il existe autant de types de cuirs que d’usages. Fin, il peut-être tendu pour créer une membrane, ou venir gainer un objet. Épais, il devient structurant voire structurel. Le designer Azambourg, en utilisant la peau de l’animal entière sans venir réaliser la coupe d’un patron à l’emporte-pièces, vient bouleverser les méthodes de production usuelles. Beaucoup d’entreprises se refusent à travailler le cuir, un matériau instable qui ne peut être rationnalisé au moment de la coupe, la forme et la taille des unités dépendant de la morphologie des animaux dont elles sont issues. Les marques de haut luxe françaises refusent, elles, les peaux présentant des marques, que l’on qualifie de « second choix ». L’enjeu ici était d’utiliser une matière noble dans son entiéreté, sans hypocrisie quant à la nature même de sa provenance. La peau présente des traces comme des cicatrices de la vie de l’animal, et sans créer de chute, sans déchet. C’est un pied-de-nez aux designers et industries n’acceptant pas l’animalité se cachant dans ces matériaux qu’ils cherchent à dés-animaliser, dont on dédramatise finalement le dessein. C’est ainsi que, formellement, il explique, « l’Animal objet est quant à lui un peu à part, il rappelle l’animal qui marche ». Comme un élément central de l’objet, la peau d’alligator ne peut échapper aux sens aiguisés du spectateur-utilisateur.  Il s’agit d’une matière très coûteuse, réputée pour être la plus luxueuse dans le milieu du design et de l’industrie des matériaux souples liés au vêtement et à l’accessoire. Sa production est limitée aux capacités d’élevage des fermes, et répond aux normes très précises de la Convention de Washington, ou CITES, qui viennent protéger et réguler les espèces animales sensibles.

De fait, lorsque l’on parle de cuir, la question d’éthique vient immédiatement à l’esprit de l’être vivant que l’on est. Ce matériau utilisé pour sa douceur et parfois aussi pour sa force symbolique, est celui dont nous sommes le plus proche et qui en même temps, faisant écho à notre propre peau, nous questionne. Le designer parle pour lui « d’une certaine forme d’hypocrisie », les gens « ne semblent pas gênés par l’idée de manger la couenne d’un jambon » ou « un bon steak », et créeraient un véritanle tabou autour du cuir. Si la question soulignait bien que l’alligator plus particulièrement n’était tué que pour sa peau, il n’y aurait rien de pire à tuer un animal pour « faire des chaussures » que pour se nourrir, sachant que nous avons d’autres moyens de se nourrir, la viande n’étant pas fondamentale pour le végétarien. On ne peut ainsi pas écarter le dessein de l’animal qui, pour François Azambourg lui-même, serait d’être mangé ou tué par asservissement à l’homme.
 
Il est opportun de se pencher sur le travail de Jocelyne Porcher, sociologue et directrice de recherche à l’Institut national de recherche agronomique. Elle s’est intéressée au statut de l’animal en tant qu’animal d’élevage, et aux leviers qui permettent de banaliser, sans culpabilité, le crime. Les animaux sont des outils de profit pour ceux qui organisent leur abattage, ils auraient le statut de « vie nue » comme a pu le préciser Giorgio Agamben dans ses écrits, reprenant des terminologies du droit romain archaïque. Pour lui, l’homo sacer, l’individu sans droit, que l’on peut tuer sans avoir à en rendre compte et qui n’est pas digne d’être sacrifié au sens théologique du terme, est celui qui vit cette zôè, cette « vie nue », ce fait de vivre biologiquement, commun à tous les êtres vivants, sans pour autant exister au sens social du terme. C’est l’évolution de la productivité après la Seconde guerre mondiale qui serait paradoxalement venue créer un animal sacer que l’on s’autorise à tuer, l’animal qui vient se distinguer de l’animal domestique - dont nous parlerons ultérieurement - que l’on « affectise », mais également de l’animal de l’éleveur traditionnel dont la vie se co-construisait avec celle de l’éleveur, avec ce qu’elle qualifie de subjectivité et de destin. Les animaux ne sont plus nécessairement des êtres en tant que tels mais des flux, gérés par des machines auxquelles s’asservissent les opérateurs. On s’occupe de leur mort dans des camps d’exception, ces structures industrielles. L’auteure parle d’une vie animale désubjectivée, dés-animalisée, d’un animal que l’on produit et désintègre comme une machine faite de pièces, un objet de l’industrie. Ainsi, on voit que ce matériau a de particulier qu’il implique non seulement le designer dans son usage, mais également les relations que peuvent entretenir l’homme et l’animal dans notre société, et la vision que l’on peut avoir de l’animal même au sein de notre organisation sociétale.
design et trophée animal, symboles d'une domestication
L’aspect formel de cet animal, comme marchant sur ses pattes, ainsi que l’utilisation de sa peau comme moyen d’authentification de l’espèce, n’est pas sans rappeler le principe même de l’animal trophée. Le mot « trophée », en son sens premier, désignait dans l’Antiquité les dépouilles matérielles d’un ennemi vaincu que l’on venait déposer sur un tronc d’arbre. C’est également cet animal empaillé que l’on a tué, victorieux. On atteste à travers la taxidermie d’une appropriation ultime du corps animal, non sans signifier le rite relatif à la mort de l’animal, et à la perénité de la mémoire que l’on va lui accorder. On s’éloigne bien de cet animal industrialisé et l’on vient au contraire lui donner une symbolique, celle de l’ennemi, et le traitement qu’on lui a infligé, au travers de la chasse, n’est pas sans rappeler l’instinct bestial que l’on peut soi-même éprouver à l’égard de l’autre, l’animal traîté comme son pair.

La symbolique du trophée se retrouve dans la volonté de l’homme de venir dompter l’animal sauvage, notamment comme le crocodile, ce mangeur d’hommes. Nous entretenons, au travers de mythes et d’histoires vécues, un rapport particulier avec l’animal consommateur de chair humaine, qui vient renverser les codes de cet asservissement habituel de l’animal industriel. C’est ce qu’exprime Jean-Marie Brohm, sociologue, anthropologue et philosophe français, lorsqu’il écrit que la puissance mortifère de l’homme à travers la domination voire l’extermination des espèces n’est qu’une facette de la coexistence conflictuelle de l’homme et de l’animal, parmi d’autres animaux dangereux voire anthropophages, comme c’est le cas avec le crocodile. L’homme emet donc une crainte qui pourrait le pousser à, par complexe, sur-dominer l’animal pour ne pas passer de prédateur à proie, de mangeur à mangé, bref, devenir un banal animal dans la chaîne alimentaire. Il prône ainsi, face à ce qu’il désigne parfois d’« excès de sentimentalisme », à un droit voire même à un devoir pour l’homme de se défendre face à ces consommateurs de chair humaine, dans le but de préserver l’unicité de l’espèce, instinct primitif. L’homme est ainsi soumis à une certaine fascination pour les différentes phases de sa disparition : le démembrement, puis l’absorption, enfin la digestion, et la déjection. L’idée pour l’homme du « devenir-proie » et du « devenir-viande animale », renvoie à l’idée insupportable que l’homme est soumis à une absolue puissance animale, qui serait capable de préméditation, de capture, à l’image de ce qu’il fait lui-même subir aux animaux qu’il domine.
 
Ainsi, en associant la peau de crocodile de l’Animal objet au zoomorphisme reptilien, je viens le dompter. On retrouve, dans cette entrée de l’animal chez soi à travers le design, comme une volonté de reprendre son statut de supériorité. Obtenu à partir d’une pile de peaux de crocodile ; la coque supérieure a en réalité été mise en forme sur la peau la plus au dessus d’une haute pile de cuirs, arrêt sur image se lisant comme une définition consumériste du rapport homme-animal. Le but du design d’objets, tel qu’il est présenté par François Azambourg, est de faire rentrer l’inventivité au sein de la maison, cette domus. De ce même terme est né le mot « domestiquer », qui signifie apprivoiser un animal sauvage, mais également au sens littéraire asservir quelqu’un, le mettre sous sa domination. Domestiquer, c’est aussi appréhender cet animal à la fois proche et lointain, rendre familier ce qui socialement reste étranger à notre condition d’homme. Ici, le crocodile n’a rien de familier. Comme nous l’avons vu, il est même profondément ancré dans l’imaginaire commun des prédateurs de l’homme. La condition d’animal domestique sous-entend nier sa première nature, et apprendre une deuxième nature, à savoir la vie et le partage avec l’homme au sein d’un milieu commun, en soumission aux règles de l’homme. Lorsque l’animal n’y trouve aucun intérêt, comme de la nourriture ou un confort général de vie, on parle alors d’asservissement, ou plus grossièrement d’objet domestiqué. Venir domestiquer son habitat au travers de pratiques particulières, l’élitiste décoration de sa maison, répondant à des critères de tendances. La mode est éphémère, tout comme les objets sont évolutifs et ainsi animés en sa présence. 
« La modernité a établi une distinction ontologique artificielle entre les objets inanimés et les sujets humains, alors qu’en fait le monde est peuplé de ‘‘quasi-objets’’ et de ‘‘quasi-sujets’’ » : dans cette citation de Bill Brown, professeur à l’université de Chicago, on comprend que ce phénomène de mode amène à animer l’inanimé, à capturer le vivant, non sans apporter une dialectique permanente entre sa condition d’être vivant et l’objet, ici cet artefact fait de la peau du crocodile.
objet artisanal, industrie animale
Bien que cette peau de crocodile soit issue d’un travail industriel, à savoir des procédés de tannage à la chaîne dans des usines à forte rentabilité, le designer a décidé de réaliser, au moyen de techniques à la fois de pointe et ancestrales, ces pièces sur commande, uniquement sur mesure. Il déplore qu’aujourd’hui, dans le design de produit, une très grande importance soit donnée au rendu photographique et à l’objet même dans sa dimension physique, favorisant ainsi une industrialisation à l’excès des procédés de fabrication, notamment dans l’utilisation de matières plastiques et de polymères stables dont la formule chimique permet d’assurer un résultat absolument constant dans la production. Il sous-entend par là que le cuir, lui, se prête bien davantage à une approche de légèreté, de texture, bref, en un panel de nuances propres au côté organique de la peau, bien loin des touchers standardisés des résines. La peau d’alligator est mise en forme à l’aide d’arrêtes en aluminium, puis la forme est ensuite scannée en trois dimensions pour créer un moule puis un tirage en résine polyester. La peau est ensuite gainée sur cette coque, ce qui sous-entend qu’ils s’agit de pièces absolument uniques, adaptées à chacune des peaux usinées. On se trouve face à un véritable travail d’artisan, qui vient considérer le déchet animal, cette peau, comme un sujet d’étude, générateur de forme, et à travers l’objet et la pratique singulière du design, cet animal semble re-gagner en considération, retrouver en individualité. Cette débauche de moyens autour de l’organique, et notamment l’utilisation de matières synthétiques comme la résine venant littéralement faire corps avec l’animal, semble évoquer l’animal-machine, ou en tous cas l’hybride semi-artificiel.
Les procédés de mécanisation, et notamment dans le traitement des animaux à la sortie d’abattoir, ne sont que le reflet de l’instrumentialisation patente de l’animal qu’on a pu précedemment évoquer. Ce qui à mon sens devient intéressant, c’est de mettre en lien cet appareillage à la pratique du design dans l’industrialisation, ou en tous cas à la mécanisation des procédés technologiques permettant l’usinage, essence même du design produit aujourd’hui. Dès la fin du XIXème siècle, l’architecte américain Frank Lloyd s’est intéressé à cette même mécanisation, cet essor des machines, appliqué au champ de la création artisanale : « Notre industrie doit former des designers au lieu de former des artisans car nos artisans, ce sont les machines, des machines, des artisans tout prêts, efficaces, dociles. Sur ce point le pouvoir mécanique a fait table rase. Comment obtenir de ces impressionnantes ‘‘machines-artisans’’ ce qu’elles peuvent faire de mieux ? Puis, au-delà du savoir-faire mécanique, comment trouver les rythmes de la forme ? ».
Les machines elles-mêmes doivent être dociles, et viennent lisser les humeurs de l’artisan, comme on a pu lisser l’existence de l’animal d’élevage au travers d’une mécanisation de son abattage, bien loin des pratiques traditionnelles des éleveurs qui sacrifiaient eux-mêmes leurs animaux pour faire de la place aux nouveaux nés. Les machines elles-mêmes doivent être dociles, et viennent lisser les humeurs de l’artisan, comme on a pu lisser l’existence de l’animal d’élevage au travers d’une mécanisation de son abattage, bien loin des pratiques traditionnelles des éleveurs qui sacrifiaient eux-mêmes leurs animaux pour faire de la place aux nouveaux nés. Sigfried Giedion est l’un des historiens de l’art et de l’architecture les plus pertinents de l’époque. Dans ses écrits, il fait un diagnostic de l’évolution des sociétés industrielles et décrit justement la mécanisation de la mort et de la viande. Il note dans ses écrits qu’une étape reste manuelle malgré l’abondance d’ingéniosité des machines venant traiter les porcs : « Lorsqu’on en vient à séparer le cuir de la chair, il faut renoncer à utiliser la machine ». La peau demande toujours le travail du « chef-dépouilleur ». Notre designer, François Azambourg, est ce « repouilleur », à contre-pied du process de l’industrie. Il est celui qui viendra recoller cette peau sur une coque, comme un exoquelette réparateur.
ontologies de l'homme et de l'animal
« L’animal n’étant pas simplement chose, n’est pas pour nous fermé et impénétrable. L’animal ouvre devant moi une profondeur qui m’attire et qui m’est familière. Cette profondeur en un sens je la connais, c’est la mienne. Elle est aussi ce qui m’est le plus lointainement dérobé. »

L’homme est par essence un animal, descendant des grands singes, et pourtant, on se refuse à penser que l’on puisse être proche de l’animal, on reste sur l’idée que nous sommes une évolution de celui-ci, qu’il est notre passé et que nous en descendons sans y être aujourd’hui attaché. C’est ce qu’explique Dominique Lestel, ethnologue et philosophe, dans sa pensée du rapport à l’animal. C’est le « propre de l’homme », ces caractéristiques plus ou moins concrètes, comme notamment la faculté de penser, qui feraient que l’homme est suffisament différent des autres animaux pour se faire sortir de l’animalité. Darwin, à travers la théorie de l’évolution, a introduit la notion selon laquelle l’homme est un animal, s’inscrivant dans la lignée phylogénétique des grands singes, tandis que la biologie et l’éthologie, va se contenter d’expliquer que l’homme et le singe sont très proches. Mais selon la logique de l’évolution, et parce que nous avons nos moyens propres et nos cultures, nous sommes autre chose, des humains qui se sont développés au milieu d’un environnement. C’est finalement un des « propres de l’homme », à savoir, sa capacité à venir agir durablement et évolutivement sur son environnement, provoquant ruptures et discontinuités avec ce qui l’entoure, sans cesse modelant, façonnant son milieu, pour aller au delà de ses conditions d’existence.

Par ailleurs, il cite l’exemple de Georges André Haudincourt qui a passé l’intégralité de sa vie à se demander, sans jamais parvenir à l’expliquer, si ce n’étaient pas les autres êtres vivants qui avaient éduqué les hommes, si ce n’étaient pas les chevaux qui leur avaient appris à courir, les grenouilles à sauter, etc. On apprendrait donc en quelque sorte de l’animal, puisque nous sommes foncièrement des êtres d’intéraction avec celui-ci, en cela que la question de la domestication ne viendrait pas contre l’animal, mais tout contre l’animal, dans une relation ontologique poreuse commune, les designers tentant de s’approcher au mieux des spécificités de ceux-ci de manière à rendre plus efficients leurs conceptions, notamment par exemple lorsque Léonard de Vinci essayait de créer sa machine à voler, ou lorsque l’on s’inspire des animaux marins pour concevoir des équipements de plongée aqua-dynamiques.

La robotique autonome et la technologie cognitive et d’information étant partiellement autonome, il est possible de créer des artefacts d’être vivants, tant d’androïdes que d’animaux. Lestel parle en ces termes de pièges de signification, de pièges affectifs. On assiste à une multiplication des artefacts auxquels on vient donner un statut d’interlocuteur, comme ce fut le cas des Tamagotchi™, que l’on considérait volontiers comme davantage vivants qu’un animal nous entourant, lui offrant volontiers ce que l’on pourrait appeler un supplément d’âme, oubliant par là que le contact avec l’animal, et la vie en commun avec celui-ci, constitue ce que signifie « être humain » dans une perspective de convergence.

C’est ainsi que Lestel nous laisse comprendre qu’un animal dans le futur va continuer à constituer ce qu’est l’humain voire le post-humain, ou l’humain augmenté, dans l’architecture productiviste. L’humain est redéployé dans sa relation avec son animalité, et l’animal qui pourrait devenir selon ses termes, un concurrent sérieux, un interlocuteur. On peut penser que nos pratiques du design, toujours plus expérimentales et notamment au travers du design fiction, viennent souvent appauvrir la relation avec ce que Dominique Lestel appelle « l’animalité réelle »... Mais alors, on peut se demander : le travail d’hybridation du designer François Azambourg, dans son traitement formel de remise en forme de la vraie peau tout comme dans sa construction d’un exosquelette de résine, n’est-il pas de réconcililer l’homme avec l’animalité réelle en proposant un artefact semi-réel de crocodile ? La technologie, autrefois mécanisation venant asservir « l’animal à produire de la viande », ne pourrait-il pas venir en médiation de nos rapports avec l’animal de demain ?
références bibliographiques
Azambourg, catalogue d’auto-édition, édition Azembourg Design Associates, avril 2014
Entretien avec François Azambourg, « Le design dans la peau », Azimuts 39 : Animal, 2013
Jocelyne Porcher, « Les animaux d’élevage sont-ils tuables ? », Prétentaine n°29-30 : Quel animal ?, 2014
Giorgio Agamben, Homo Sacer. Le pouvoir souverain et la vie nue, Éditions du Seuil, 1997
Jean-Marie Brohm, « L’Homme, une proie pour l’animal », Prétentaine n°29-30 : Quel animal ?, 2014
Bill Brown, « Thing Theory », Critical Inquiry, 2001
Site de l’auteur, rubrique « Procédés »
Frank Lloyd Wright, L’Architecture moderne, 1930
Sigfried Giedion, « La Mécanisation et la mort : la viande », La mécanisation au pouvoir, Édition 2013 de la Cité du design en collaboration avec le post-diplôme Design et Recherche ESADSE, 1948
Georges Bataille, Théorie de la religion, 1973
Conférence de Dominique Lestel, « L’animal est l’avenir de l’homme », Les Ernest, décembre 2009
Back to Top